Interview croisée de Juan & Jean-Luc Garréra, auteurs du Fatals Picards Comics Club

Juan et Jean-Luc Garréra
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Bonjour
Les plus assidus auront la réponse, mais pour les mauvais élèves peux-tu nous dire qui tu es et ce que tu fais dans la vie ?

Juan :

Bonjour
Je m’appelle Juan, je suis dessinateur de bandes dessinées depuis la fin du siècle dernier, et avant cela j’ai travaillé pendant 20 ans dans le cinéma d’animation français.
Je suis venu à la BD avec Ptiluc, l’auteur de Pacush Blues, dessinateur culte que j’adorais dans les années 80 et que j’aime toujours.
Cela se rapproche assez du travail des Fatals Picards puisque ce sont des chroniques satiriques et sociales de notre monde à nous, transposées dans une colonie de rats dans un dépotoir.

J’ai commencé à bosser avec lui en 91-92 sur une série en dessins animés qui ne s’est jamais faite et pour laquelle j’avais fait des boards. Quand il a décidé d’adapter ce dessin animé en BD, il est passé me voir pour me demander si ça m’intéressait, j’ai dit banco !
J’ai fait du dessin animé jusqu’en 2004 (des séries et des spéciaux de 26 minutes et 2 longs métrages : Le château des singes en 1995 et Les enfants de la pluie en 2001 (adapté du livre de Science Fiction A l’image du dragon, de Serge Brussolo, (réalisateur Philippe Caza et Philippe Leclerc), et à côté de ça j’ai commencé la BD en 97-98

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Jean-Luc Garréra :

Salut. Je suis zôteur de BD, c’est à dire dessinateur et scénariste. Et, accessoirement, amis des Fatals Picards depuis une quinzaine d’années. Pfiou, ça nous rajeunit pas…

J’ai commencé par bosser dans la presse avec, en particulier, une longue collaboration de 10 ans avec le magazine Guitar Part. J’y illustrais des articles, les éditos, et j’y ai créé le personnage de « Guy Taréro et les Zicos » au rythme d’une page BD par mois, pendant cette décennie. Un super laboratoire pour un débutant comme moi, à l’époque.

J’ai ensuite commencé la BD en albums, grâce à mon maitre Jedi, Raoul Cauvin (Tuniques bleues, Femmes en Blanc, Pierre Tombal, Cédric, etc.) qui m’a appris à construire des scénarii, des gags, de la BD, quoi. C’est Bamboo qui m’a, en premier, ouvert ses portes, et depuis, c’est la famille. Ça ne pouvait pas être mieux pour moi que la BD des Fatals sorte chez Bamboo.

Oeuvres Animées de Juan

 

A part dans le super Fatals Picards Comics Club déjà en vente dont nous allons reparler, où a-t-on pu avoir l’occasion de voir le résultat de ton travail ?

Juan :

J’ai fait 7 albums avec Ptiluc, 2 avec Jim (pas celui des Fatals), quelques planches hommage dans les publications de collègues, avant d’attaquer mes propres séries. Le FPCC est ma quatorzième seul au dessin.

(Liens  en bas de page)

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Jean-Luc Garréra :

Alors là, vaste sujet ! Depuis les quelques années que je traine mes crayons sur les sentiers de la BD, j’ai commis pas mal de trucs, depuis mes débuts, il y a plus de 20 ans dans la presse musicale. J’ai donc illustré le magazine Guitar Part, avec mon premier personnage de “Guy Taréro”. Mon “tremplin” vers la BD, à ce moment-là. Pas d’album de cette BD, juste les parutions en mag. 🙂

Côté albums, j’ai réalisé la série “Les Vélomaniacs” chez Bamboo (Éditeur du Fatals Picards Comics Club, donc d’un goût certain).

Plus récemment, et chez le même et brillant éditeur Bamboo, les Oiseaux en BD et les Arkéos, qui sont deux sériés humour/pédago dans la nouvelle collection “Apprendre en s’amusant”.

J’ai aussi co-scénarisé les Musicos et Rock’n’Vrac chez Bamboo aussi. Pareil pour « Zapping Generation » dans le journal de Spirou (Éditions Dupuis).

J’ai commis d’autres exactions chez d’autres éditeurs, comme la saga “Droit au but !”  chez Hugo BD qui fêtera ces 15 ans et avec un vingtième tome en 2023 ! Ça ne nous rajeunit pas non plus, ça.

J’ai fait un incursion dans le côté sérieux (Oui, je suis faible des fois) avec le tome 2 de le Docu BD « Narbonne » T2 aux éditions « Petit à Petit ».

Je pense que c’est tout, pour l’essentiel. Mais j’ai quelques albums éparses à côté de mes séries “phares” (Oui, si on me laisse faire, je fais des albums partout).

(Liens  en bas de page)

 

Comment as-tu connu les Fatals Picards ?

Juan : 

Comme beaucoup de gens, je les ai découverts lors de leur passage à l’Eurovision en 2007. Comme ma culture est plus le Métal, cela m’a fait marrer mais sans plus.

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Jean-Luc Garréra :

J’ai découvert en premier « Goldorak est mort » et ça a été la claque. Droit de Véto a donc été mon premier album des Fatals. Depuis, je suis Fatals dépendant…

 

D’où vient l’idée ? Qui a contacté qui ?

Juan : 

Jean Luc connaissant Jean-Marc depuis une dizaine d’années à l’époque, cela faisait un moment qu’ils discutaient ensemble de lancer un projet de BD. Parallèlement, cela faisait plusieurs années que Jean-Luc et moi souhaitions collaborer, mais rien n’a abouti. Un jour il m’a appelé en me disant « Tiens il me reste un truc dans les cartons, c’est l’arme Fatale : qu’est-ce que tu en penses ? », et il m’a proposé de participer à ce projet de BD avec les Fatals Picards comme personnages.

Il m’a donc appris à mieux les connaitre en m’envoyant quelques liens, je suis allé de mon côté voir des vidéos en pagaille, je me suis régalé, et en 2015 nous sommes allés les voir sur scène avec quelques dessins que j’avais préparés

Il faut savoir qu’un dessin, un personnage, ce n’est pas qu’une caricature. Il faut capter la personnalité des sujets, à ressentir ce qu’ils sont.

On a évidemment grossi et exagéré quelques traits, notamment pour Paul qu’on a rendu un peu trop naïf, un peu comme Sammy dans Scooby-Doo, ou Looping dans l‘Agence tous risques.

Ca me chagrine un petit peu parce que Poupou est plus percutant que l’image qu’on a donnée de lui, et il faudra revoir ça si on a le plaisir d’envisager une suite…

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Jean-Luc Garréra :

Alors, c’est le moment « Boomer », allons-y. Je vous parle d’un temps où « ze rézosocial » était Myspace. Ayant eu moi-même quelques accointances avec la batterie, j’avais engagé des conversations avec le batteur des Fatals Picards. Et – Joie ! – Il me répondait ! Jean-Marc était, le hasard fait bien les choses, amateur de cyclisme, et je travaillais sur ma série « Les Vélomaniacs ». Je lui ai proposé de lui amener un album dès que les Fatals passeraient pas loin de mon Narbonnais natal, et c’est ce qui s’est passé quelques temps plus tard. Inévitablement, la découverte du groupe « en vrai » m’a marqué, et je trouvais évident qu’ils feraient de super persos de BD. On en a discuté, à chaque fois qu’on se voyait, ou par téléphone, et petit à petit, ça a pris corps. Mais je ne me voyais pas vraiment dessiner ce que j’imaginais, alors j’ai noté, écrit, et construit la version que j’avais en tête, en attendant de trouver le crayon qui correspondrait. Bizarrement, j’ai mis longtemps à penser à Juan, alors qu’on se connaît depuis longtemps, et que je suis fan de son talent, qui ne le serait pas ? Bref, un jour, les fils se sont touchés, et ce fût le grand « boum ! ».

Premiers Croquis de 2015

 

Qu’est-ce qui a fait qu’il y ait tant de temps entre 2015 et les prémices du projet et le moment de la sortie de la BD ?

Juan :

Il y a plusieurs facteurs : en 2015 j’étais encore prof de cinéma d’animation dans une école de 3D et j’avais 28h de cours par semaine donc j’avais peu de temps pour dessiner.

Par-dessus tout ça, j’ai fait un infarctus, mais ça a été par la suite un déclencheur pour arrêter l’enseignement et me consacrer à temps plein à la BD.

On a proposé les premières planches à Olivier Sulpice mais il n’a pas vraiment accroché au premier abord (n’étant pas trop du monde du rock, il ne s’attendait pas forcément à ce format et cette approche, il envisageait plutôt des brèves de scène ou des carnets de route). Sentant que ce projet nous tenait à coeur, il nous a cependant demandé de lui reproposer quelque chose.

Jean-Luc ayant d’autres projets en cours, c’est ce qui a fait que ça ait pris autant de temps.

Olivier est venu me proposer d’autres projets pour patienter en attendant que Jean-Luc soit dispo, ce qui m’a amené à faire 5 albums avant d’attaquer le FPCC.

Et une fois lancé sur l’album, y’a un type sympa qui a pris « Mon père était tellement de gauche » au premier degré et m’a refusé une priorité à droite. Moto en épave et bras droit en vrac, je me suis retrouvé dans l’incapacité totale de dessiner pendant 18 mois alors qu’il ne me restait plus qu’à encrer la troisième histoire, soit l’équivalent de 2 mois de travail…

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Jean-Luc Garréra :

C’est la faute à Juan ! Haha ! Nan, je rigole… Effectivement, ça peut paraître long, mais, hormis les sérieux soucis de l’accident de moto de Juan, il y a toujours des périodes de transition entre l’envie, la création, et l’objet terminé. On a tous nos séries en cours, et créer une nouvelle série est un travail d’envergure, même pour dire des bêtises. Donc, il faut étoffer le boulot, laisser mûrir, discuter, boire des coups, rigoler, trouver l’éditeur, le convaincre, boire des coups, rigoler. On n’a pas un métier facile, faut pas croire.

 

Quand tu as rencontré les Fatals lors de ton premier concert, comment ont-ils accueilli ton travail ?

Juan :

Ça faisait un moment qu’ils voulaient faire un truc avec Jean-Luc, ils étaient chauds bouillants.

Quand j’ai amené les dessins ils savaient déjà que ça pourrait se faire et ont été emballés, mais je les soupçonne d’être beaucoup trop gentils…

Je leur ai donné les originaux des dessins (pas très réussis) de leurs personnages de l’époque. Ne les connaissant pas encore, je ne les avais pas « captés » comme aujourd’hui, d’où une différence entre ces ébauches et le résultat final. 

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Jean-Luc Garréra :

Alors, pour le coup, quand on s’est rencontré la première fois, il n’était pas encore question de faire une BD. Mais rapidement, l’idée s’est imposée d’elle-même, et ils ont été branchés dès le départ par l’idée. J’y bossais de mon côté et montrais des idées de temps en temps, par mail pour lors de nos rencontres. Le concept s’est élaboré par petits bouts, comme ça. J’ai déjà dit qu’on buvait des coups et qu’on rigolait, aussi ?

 

Sans spoiler les gens qui ne l’ont pas lue, on peut dire que ce sont quand même 3 histoires bien farfelues… Quelle a été l’inspiration qui a amené ces histoires déjantées mais qui pour la communauté de fans tombent juste ?

Juan :

Les 13 BD précédentes étaient des BD d’humour classique, type gag en une planche, avec des gags suivis d’autres gags. Là, j’avais envie de faire une BD certes drôle, mais avec du fond et sous forme d’histoires complètes, de façon à pouvoir travailler un peu plus la mise en scène sur du long terme.

On a essayé de s’inspirer de la manière dont les Fatals écrivent leurs chansons : on a parlé de choses sérieuses sans se prendre au sérieux avec un sujet de fond qui peut être, social, humain, dramatique.

Ils ont une manière d’écrire qui me rappelle les sketches de Coluche ou de Pierre Desproges qui disaient des choses très sérieuses en déconnant à fond.

Donc, le projet de BD avec Jean-Luc, qui est sur cette ligne-là, était de raconter des choses sérieuses tout en étant absurdes par moments, comme a pu le faire Gotlib entre autres.

On a rien inventé au niveau stylistique, on a juste essayé de garder leur personnalité et de rester dans un prolongement de ce qu’ils sont et ce qu’ils font.

Les 3 histoires peuvent paraitre absurdes et/ou farfelues, mais les sujets de fond sont sérieux.

Sans spoiler, tout cet album tourne autour de la manipulation du public par les médias mainstream et les producteurs, sujet qui horripile autant les Fatals que nous…

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Jean-Luc Garréra :

Comment ? Il y en a qui ne l’ont pas lue ? Bon, pour les quelques-uns au fond, alors.

En fait, mon but, en tant que scénariste sur cette BD, c’était de rester fidèle à l’esprit « Fatals ». Je voulais coller, d’une certaine manière, à leur manière d’écrire. Chaque histoire a son sujet propre, mais un petit regard de fond, que le lecteur captera ou pas. Le récit des Zombies est une allégorie des vieux tubes qu’on déterre plutôt que d’encourager la création musicale. Une bonne vieille compil des années 80, et on s’encombre pas avec des zazous de musiciens pour créer un nouvel album, trop risqué. Donc, on a le délire, l’humour, et un sujet de fond. Je ne voulais pas de récits linéaires basiques, qui auraient certainement fonctionné aussi, mais pour les Fatals, on se sort les doigts, et on tente des trucs. On est là pour dénoncer ! Et l’esprit « Scoobidoo » était primordial depuis le début. Pour moi, c’était une évidence. Des zombies, une légende, des monstres, et le pire de tout, la télé réalité. Brr, je vais loin, des fois !

 

Pour revenir sur les personnages : quels ont été les traits ou les éléments de personnalité qui ont influencé chaque personnage ? Qu’es-tu allé capter chez les Fatals et chez Benoît qui a servi à créer les personnages ?

Juan :

Pour le dessin de Benoît, je me suis nourri de ce que les Fatals m’ont dit de lui car je ne le connais pas.

Pour les 4 cavaliers de l’apocalypse, c’est à force de passer du temps avec eux avant et après les concerts, mais aussi en me nourrissant de toutes les vidéos d’interviews et de concerts que j’ai pu trouver pour voir la manière dont ils s’expriment, voir qui est qui, qui interagit comment avec qui, et en parlant au téléphone avec eux. 

J’ai eu de longues conversations avec Jim, Billy et Paul, ainsi qu’avec Yves avec qui je partage des points communs comme nos goûts musicaux (l’album des Partouzzzze tourne en boucle dans la voiture) ou l’amour de la moto…

J’ai appris à les connaitre comme ça et c’est ce qui a forgé la manière dont je les ai faits bouger dans la BD.

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Jean-Luc Garréra :

Avec le temps, et sans même le faire consciemment, on retient de chaque personne des détails qui les caractérises. Pire encore quand on fait de la BD. Inévitablement, au bout d’un moment, chaque Fatal est devenu, dans mon esprit, un perso de BD. Bien sûr, c’est exagéré, mais c’est le but. Paul n’est bien sûr pas Poupou, heureusement pour lui. Mais en plus de parler de personnes existantes, ici, on prend le parti de créer de vrais persos de BD. Il faut faire des concessions, équilibrer les persos, même si, inévitablement, certains ressortiront plus dans certains récits. Un peu comme dans un groupe. Mais l’idée, c’est qu’une fois que les persos sont créés, on reste dans le stéréotype qu’on a mis en place. C’est ce dont on a parlé au début avec eux. On crée des avatars, et on joue avec, mais ce sont les persos des Fatals, pas les Fatals. Du coup, je complexe moins à faire des situations débiles et leur faire dire des trucs qui le sont tout autant.

Pour Benoit, côté scénario, on m’a indiqué un truc qu’il dit tout le temps. Je n’y avais pas prêté attention avant, mais c’est vrai. On verra si certains ont repéré ça dans l’album.

 

Est-ce que ça a été difficile de les représenter dans une BD ?

Juan :

Du point de vue dessin, clairement non. Ce qui a été difficile c’est de prendre le temps d’apprendre à les connaitre plus personnellement. Mais une fois que ça a été posé, ça a été un régal.

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Jean-Luc Garréra :

Pas du tout, au contraire. Comme je disais précédemment, il suffit de les connaître, et je commence à les connaître pas mal, maintenant. Eux aussi, d’ailleurs, faut que je me méfie.

 

Au-delà du besoin de connaitre la personne pour la transformer en personnage, est-ce que ça a représenté un gros travail de documentation ?

Juan :

Oui, mais c’est une constante chez moi, j’aime que les choses aient une réalité historique donc j’ai fait la collection de photos de tous les instruments qu’ils pouvaient avoir, surtout pour la basse Musicman avec la tête de mort compliquée à dessiner, les pédales, les amplis, la batterie…

Puis pour les tatouages, pour restituer la façon dont ils s’habillent au quotidien, j’avais aussi besoin de les avoir sous les yeux souvent.

J’avais des photos d’eux partout, j’avais l’impression qu’ils étaient dans mon bureau toute la journée !

Evidemment la couverture me fait mentir puisqu’on voit Poupou avec des chaussures jaunes et bleues et Billy avec une chemise rose (ce qui n’arrive jamais à part pour l’Eurovision !), mais il fallait que ça pète ! Et je ne suis pas sûr que dans l’intimité Poupou porte le pyjama avec des mules en forme de licorne…

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Jean-Luc Garréra :

La question est plutôt pour Juan, là. De mon côté, l’essentiel est l’observation. Quand un auteur de BD reste un peu trop tranquille, c’est qu’il analyse. Méfiance !

 

Sans balancer de nom (mais tu fais comme tu veux hein…), est-ce qu’il y en a un qui a tiqué en voyant son personnage ?

Juan :

Avant de dessiner quoi que ce soit, on leur a présenté les versions écrites. Il y a eu un truc sur le plan scénaristique que je sentais moyennement et ça n’a pas loupé.

Sur une des 4 pages de présentation, celle de Vivou, il achète une guitare via Tinder. Au départ, c’était un gag avec une groupie, mais ça ne collait pas avec la personnalité d’Yves qui nous l’a très gentiment signalé. Jean-Luc a réécrit le truc pour travailler sur le  “galbe de la guitare”  et faire une espèce de quiproquo. Ça marche mieux du coup !

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Jean-Luc Garréra :

C’est vrai qu’il y a eu ce truc de la groupie. Mais dans l’absolu, c’est normal. C’était un gag classique à la base, mais je m’en suis servi comme gag de présentation (Il y a un gag sur chaque Fatal au début de l’album). Ce n’était pas définitif et le retouche s’est faite dans la foulée, c’est normal. Et c’est comme ça qu’on fonctionne. Il faut que ça leur convienne avant tout. Et pour tout le reste, ça a roulé comme dans du beurre (ou un truc comme ça).

 

Comment se sont-ils impliqués ? Avez-vous eu une liberté totale d’écriture et de dessin ? Ou au contraire vous-ils donné un cadre ?

Juan :

C’était liberté totale. Jean-Luc leur a proposé des thèmes qu’ils ont développés ensemble. Je ne me souviens pas qu’ils nous aient cadrés sur quoi que ce soit. On leur a tout montré par acquit de conscience mais à part la planche de présentation de Vivou, ils nous ont dit « Banco, allez-y les gars ! ».

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Jean-Luc Garréra :

Le paradis sur terre ! J’avais déjà quelques sujets sous le coude, mais j’ai proposé ceux-ci car je voulais montrer dès le premier tome ce que pouvait être l’univers de la série. Des sujets très différents, des ambiances et des décors variés. On a échangé, par message, téléphone, ou lors de nos rencontres. Et même côté éditeur, j’ai eu une liberté d’écriture totale, même si chaque récit était lu et validé, bien sûr. Mais tout est passé sans heurt, souple. Olivier Sulpice trouvait ça marrant et attendait le suivant. Ça fait plaisir, merci Olivier.

 

Pourquoi avoir mis si longtemps à sortir cette BD ?

Juan :

J’ai commencé à bosser sur l’album fin 2019. J’ai passé 4 mois à développer les croquis. On a signé le contrat début 2020 à un concert au Transbordeur de Villeurbanne (NDLR : ON Y ETAIT !!), en présence d’Olivier dont on pensait qu’il allait regarder un ou deux morceaux pour voir ce que ça donnait, mais en fait il a passé le concert à la table de mixage !

On a donc commencé à livrer des planches dès début 2020. L’accident est arrivé en novembre 2020, et je n’ai pu recommencer à travailler qu’en mai 2022…

Comme j’ai fini les planches au mois de juillet, et que les coloristes ont fini les couleurs dans la foulée, on avait envisagé de le sortir pour l’Olympia du 16 septembre. Mais entre la période du confinement et le problème des imprimeurs (l’approvisionnement papier et carton s’est complexifié), il y a énormément d’albums en retard, et l’éditeur n’a pas réussi à négocier une date dans ces eaux-là.

Mais ce n’est pas tout. Il y a aussi un choix stratégique de la part de Bamboo qui évite de sortir des albums pendant la période de Noël pour éviter de les voir noyés dans la masse, ce qui a amené une sortie le 11 janvier pour pouvoir donner une meilleure visibilité à l’album.

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Jean-Luc Garréra :

Tout pareil. Comme dit Juan, on a démarré en 2020, mais l’accident a mis un sérieux coup de frein (sans mauvais jeu de mots). Le souci, c’est qu’on avait commencé à en parler, surexcités que nous étions à l’idée de réaliser enfin ce projet, et la coupure a fait que le temps a semblé long. Mais dès qu’on attaque le 2, Juan sera assigné à résidence, avec interdiction de rouler, ne serait-ce qu’en trottinette électrique, même si je sais qu’il est addict. (Aïe, pas sur la tête, Juan, je plaisante ! Hé, ça va mieux ton épaule. ^_^)

 

Bon, maintenant qu’il est sorti, est-ce qu’il marche cet album ?

Juan :

Je n’ai pas de chiffres, mais ce que je vois lors des différentes sessions de signature c’est que ça marche plutôt bien.

Quand on a fait la dédicace avec Poupou et Billy à Lille, on en a fait 77 dans l’après-midi par exemple, ce qui est normalement ce qu’on fait sur 2 jours.

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Jean-Luc Garréra :

Bin, j’espère bien ! Je n’ai rien de précis là-dessus pour l’instant, mais j’espère vraiment que la série a trouvé son public et qu’on attaquera la suite bientôt. En tout cas, moi, je suis chaud, et je sais que Juan et les Fatals le sont aussi.

 

Quelle est la population qui achète l’album ? Des fans hardcore ? Des M. et Mme Toutlemonde ?

Juan :

A Lille, Poupou et Billy étant là, j’ai eu 98% de fans du groupe. Ils connaissaient tout le monde, sauf un type qui est passé devant la vitrine qui a vu le truc et s’est approché par curiosité.

En revanche, à Ales, j’ai fait une dédicace où j’en ai signé une quarantaine et j’ai seulement rencontré 2 fans, les autres étaient des fans de BD qui découvraient le truc.

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Jean-Luc Garréra :

Inévitablement, les fans seront en première ligne, toujours. On touche à leurs idoles, c’est normal. Mais le but avoué de cette BD pour moi, à la base, c’est de tenter d’amener d’autres personnes, plutôt lecteurs de BD, à s’intéresser, voire découvrir, les Fatals Picards. C’est hyper présomptueux, mais si ça peut amener quelques millions de fans supplémentaires aux Fatals, je serais ravi. (On me dit dans l’oreillette que millions, c’est beaucoup. Boh…).

En tout cas, cette BD est pensée pour être lue, même si on ne sait pas que les Fatals existent en tant que groupe. Les aficionados y verront des références et des clins d’œil que le manant ne soupçonne même pas (et tant pis pour lui.).

 

Comment se passent les rencontres avec les gens qui achètent l’album ? Quel retour vous font les gens, comment est perçu l’album par les lecteurs ?

Juan :

Ce qui me revient, c’est que tout le monde est plutôt en amour, surtout les fans.

Ceux qui l’ont lu ont retrouvé les personnages et m’ont dit que c’était vraiment eux, et j’en suis très touché.

Ceux qui ne connaissent pas le groupe mais qui connaissent mon style et les albums précédents étaient enchantés de voir quelque chose qui partait un peu plus loin dans mon délire que je ne le fais d’habitude.

Avec Jean-Luc on a la même approche, ça a été plus collégial. Il m’a proposé des scenarii d’une dizaine de pages en me disant « vas-y éclate-toi ». Du coup j’ai ajouté des pages, des saynètes, des dialogues en faisant notamment des clins d’œil à des chansons (dans Les fanges de la télé-réalité par exemple, j’ai renommé une des filles Kim, et quand Poupou parle au dragon vous devriez reconnaitre un passage du Combat ordinaire, etc…).

Du coup on est passés d’histoires qui devaient faire une dizaine de pages chacune à 22 !

Pour revenir à la question initiale : j’ai regardé les chroniques sur internet (même si on sait que normalement il ne faut pas le faire pour ne pas se plomber le moral !!) et j’ai trouvé des trucs plutôt sympa, notamment parce que selon les auteurs ça correspondait à l’esprit des Fatals.

Bon on ne fait pas l’unanimité. Sur un site de vente je trouve un avis à 2 étoiles : « Franchement décevant. Attendu depuis plus d’un an, cet album est très décevant. Scénario décousu, dessins confus, bref un intérêt minimal pour un prix trop important ». Mais jusque-là c’est le seul !!

J’ai rencontré aussi un gars à Lille que les scénarii en l’état n’étaient pas une bonne idée. Il aurait préféré des souvenirs de scène ou des choses plus proches de la vie du groupe, ce que je peux comprendre.

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Jean-Luc Garréra :

Jusque-là, je n’ai pris que des retours de bonheur et d’amour dans ma face avec cette BD. Je ne regarde pas particulièrement les critiques, donc j’ai tendance à considérer ce qu’on me dit en face, et je ne suis pas déçu. Je peux comprendre que certains s’attendaient à une autre concept, plus proche de la vie de tournée du groupe, mais c’est justement ce que tout le monde pense quand on parle d’une BD de ce genre. Et comme j’aime pas trop faire là où on me dit de faire, j’avais envie d’autre chose. Quel gâchis ça aurait été quand on voit la richesse des persos ! Il y a aussi les adaptations en BD, mais ça a déjà été fait, et bien fait, par Michael Lozé (J’espère que j’écris bien son nom) il y a quelques années.

Bref, notre vision des choses a l’air de convenir à pas mal de gens, et j’en suis ravi.

 

Est-ce qu’un tome 2 est en préparation ? Avez-vous déjà des idées d’histoires ?

Juan :

Y’a pas de tome 2 en préparation à ma connaissance même si je suis sûr que Jean-Luc a déjà couché quelques idées sur le papier, en plus des thèmes qu’on a écartés pour faire la sélection composant la BD.

« Turlurtutu » et l’approche du suprémacisme blanc comme on le voit dans O’brother me parait une piste formidable, et j’ai vraiment envie de travailler ce sujet-là. ET pour en avoir parlé avec eux, les Fatals aussi…

Evidemment, tout cela n’est que suppositions. Tant qu’on ne saura pas si les ventes fonctionnent il sera difficile de se projeter sur une éventuelle suite.

On croise tous les doigts pour que ça marche et qu’on puisse continuer l’aventure. Bamboo aussi puisqu’ils ont mis un 1 sur la tranche de l’album !!

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Jean-Luc Garréra :

Comme on disait plus haut, on ne sait pas encore si ou quand on fera un tome 2, mais effectivement, j’y bosse en louzdé, et j’ai déjà trop de matos pour un seul tome. J’ai donc commencé le difficile travail de tri, mais j’espère vraiment que le public va s’arracher le T1 s’il veut savoir comment les Fatals ont rencontré Bernard Lavilliers. Ha, mais zut, j’en dis déjà trop !!!

Les BD's de Jean-Luc:

Fatals Picards Comics Club, Scénario Jean-Luc Garréra, Bamboo Editions

VélomaniacsScénario Jean-Luc Garréra, Bamboo Editions

Les Oiseaux En BDScénario Jean-Luc Garréra, Bamboo Editions

ArkéosScénario Jean-Luc Garréra, Bamboo Editions

MusicosScénario Jean-Luc Garréra, Bamboo Editions

Rock’n VracScénario Jean-Luc Garréra, Bamboo Editions

Zapping Generation, Editions Dupuis

Droit au but, Hugo BD

NarbonneT2, Editions Petit à Petit

Les BD's de Juan :

Paddock : scénario Pat Perna (4 tomes), Vents d’Ouest

La Légende de Little Boost : scénario Fane (One Shot), Vents d’Ouest

Le Guide des Mômes : scénario Christian Godard, Vents d’Ouest

Le Guide des Chats : scénario Goupil, Vents d’Ouest

Mon Tour du Monde en 4L (T1) : scénario Pat Perna, Vents d’Ouest

Mes Premières Fois : (2 tomes), scénario Sti, Bamboo Editions

Les Seignors : (3 tomes), Scénario Sti et Hervé Richez, Bamboo Editions

Fatals Picards Comics Club, Scénario Jean-Luc Garréra, Bamboo Editions

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